L'horreur (peut) être humaine...
Dans le mythe de Sisyphe, Albert CAMUS écrivait "il n'y a qu'un problème philosophique vraiment sérieux : c'est le suicide. Juger que la vie ne vaut ou ne vaut pas d'être vécue, c'est répondre à la question fondamentale de la philosophie"... Il ajoutait peu après "je vois que beaucoup de gens meurent parce qu'ils estiment que la vie ne vaut pas la peine d'être vécue. J'en vois d'autres qui se font paradoxalement tuer pour des idées ou des illusions qui leur donnent une raison de vivre".
Deux événements tragiques viennent de donner une intensité poignante à cette réflexion : les attentats en Algérie et au Maroc et le massacre de Virginie. Non seulement il y a eu suicide, mais encore assassinat collectif dans les deux cas, comme si le désir morbide de nier l'humanité en soi et chez autrui tendait au paroxysme.
Des événements que tout sépare, dira-t-on ? Non, leur communauté est bien celle que soulignait Albert CAMUS : dans une société trop matérialiste et égoïste l'expression fanatique de la croyance et de la haine de ceux qui accumulent les richesses se rejoignent car elles sont toutes les deux la désespérance face à l'absence d'un ordre légitime et porteur de sens, un ordre que le partage équitable des richesses produites par l'économie de marché peut renforcer, mais qui doit avant tout s'appuyer sur des croyances éthiques et spirituelles. C'est dans cette perspective que les grandes religions monothéistes portent des valeurs essentielles. Mais c'est aussi la condition pour que les sociétés fondées sur la démocratie libérale ne sombrent pas dans la décadence...
La proximité avec les victimes algériennes, marocaines et américaines est trop grande pour que nous ne nous sentions pas nous mêmes victimes : la folie du monde ne doit pas nous faire oublier que dans chaque homme, il y a notre frère...