Homophobie et "crime-pensée"
La décision de la Cour de Cassation est à la fois révélatrice et clivante. Comme un révélateur, en effet, elle fait apparaître les zones d’ombre et de lumière.
Côté lumière, il y a les partisans de la liberté d’expression, ceux qui pensaient comme moi et approuvaient mes propos, ceux qui partageaient les idées mais regrettaient la forme de leur expression, et enfin ceux qui s’opposaient à mes idées mais m’ont exprimé leur satisfaction à la suite de la cassation sans renvoi, parce qu’ils constatent que j’étais victime d’un terrorisme intellectuel intolérable en démocratie. Le côté obscur apparaît lui aussi avec plus de netteté, même si bien sûr celle-ci n’est en rien de la clarté.
Les porte-parole habituels du lobby ne craignent pas de maudire aujourd’hui une justice qu’ils chérissaient hier, en oubliant qu’ils critiquent une décision de la plus haute instance judiciaire de notre pays, dont le caractère historique semble leur échapper. Les arrêts qui m’avaient condamné ne sont pas cassés sur la forme, avec renvoi devant une nouvelle juridiction. Ils sont cassés sur le principe, ce qui signifie que suivant en cela la jurisprudence constante de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, la primauté de la liberté d’expression, même pour les idées qui dérangent est affirmée dans notre pays à l’encontre des articles liberticides de la loi portant création de la Halde et auxquels je m’étais opposé.
Il est difficile d’admettre pour nos adversaires que leur tentative de complot contre la démocratie a échoué. Une ténébreuse affaire de pseudo-agression homophobe contre un jeune homme dans le Pas-de-Calais en 2004 terminée par un non-lieu, avec un innocent maintenu en prison près d’un an sans que personne ne s’en soucie, a été utilisée pour introduire au Sénat, souvent plus clairvoyant, les notions d’homophobie et d’orientation sexuelle, dans la loi. Ces concepts mal définis, imprécis, sont indignes du droit. Ils correspondent à ce que Orwell décrit dans 1984 en parlant de la novlangue. Ce sont des mots destinés à transformer le langage en prison, à contraindre la pensée, et à punir tout écart. L’homophobie n’est rien d’autre que le « crime-pensée ». Malgré les dénégations du Ministre de la Justice et du rapporteur de la loi, ils ont servi à ce dont nous les soupçonnions : porter atteinte à la liberté d’expression au travers de l’action communautariste de certaines associations. Le lobby était parvenu à faire voter une loi sous le coup d’une émotion artificiellement provoquée qui permettait désormais d’interdire le débat puisque toute contestation de l’homosexualité devenait injure homophobe. Le coup manqué, les auteurs se replient sur ce monde qui est le leur, rempli des échos et des reflets de ceux qui à force d’être ensemble oublient que dans le vrai monde, on peut et même on doit penser autrement qu’eux. La bêtise et la mauvaise foi qui apparaissent dans de nombreuses réactions du lobby sont consternantes. On y trouve toujours cette confusion entre la critique argumentée à l’encontre des comportements et l’injure envers les personnes, toujours aussi l’emploi du terme « homophobe ».
Que les choses soient claires : moi qui ai été traité de « connard » et de « délinquant », de « honte de la République », j’accepte parfaitement que l’on conteste mes idées, mais je ne laisserai pas sans suite judiciaire l’emploi du mot homophobe à mon encontre. Que les apprentis blogueurs et les pseudo-journalistes se le tiennent pour dit.